Améliorer la sécurité des ballons de défilé grâce à la science.
Les ballons géants qui descendent la rue Central Park West à New York en novembre de chaque année font partie d'une tradition très appréciée du défilé de l'Action de grâce de Macy's. En temps normal, les ballons flottent sans effort durant le parcours du défilé, mais les vents forts soufflant en rafales de New York et les obstacles aériens comme les lampadaires et les feux de signalisation ont suscité des préoccupations concernant leur acheminement sécuritaire tout au long de l’histoire du défilé.
En outre, les ballons de défilé ont considérablement grossi depuis que le premier « Félix le chat » gonflé a sillonné le parcours du défilé en 1927. De nos jours, les ballons remplis d’hélium atteignent généralement jusqu'à 18 mètres de long, 9 mètres de large et de 15 à 21 mètres de haut, nécessitant des manœuvres délicates dans les rues de la ville où s'agglutine la foule.
En 1997, après un accident causé par des vents violents qui ont poussé un lampadaire dans la foule, la ville a engagé les experts en étude des vents de RWDI et de Parsons Brinkerhoff Quade & Douglas afin de réaliser un rapport sur l’incidence du vent sur les ballons de défilé. En se fondant sur ce rapport, un groupe de travail de la ville a publié des directives opérationnelles relativement aux conditions précises lors desquelles les ballons pouvaient être utilisés.
Même si ces recommandations étaient en vigueur, les haubans d’un ballon se sont accrochés dans un lampadaire à cause d'une forte rafale au cours du défilé de 2005, faisant pleuvoir des débris sur les passants dessous. La ville a ensuite demandé à RWDI et à PBQD de revoir les directives opérationnelles existantes et d’en élaborer d'autres, plus strictes.
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Le défi
Prédire exactement le comportement des vents locaux dans le paysage urbain dense de Manhattan est une tâche complexe. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne les rafales à une intersection de rues, où la combinaison du relief « canyon urbain » avec des vents pouvant provenir de n’importe quelle direction se traduit par des conditions très turbulentes.
Nos ingénieurs ont entrepris de découvrir les corrélations entre la vitesse de vent enregistrée et les données directionnelles aux aéroports locaux et les effets réels du vent sur les ballons dans les « canyons urbains » de Manhattan. Notre intention : établir les meilleures sources de données possibles sur lesquelles fonder les décisions opérationnelles relatives aux ballons.
Notre approche
Étant donné que les bâtiments peuvent influencer considérablement les conditions locales des vents, nous avons organisé un essai sur le terrain sur six pâtés de maisons, de manière à mesurer les données réelles sur le vent et ses effets sur un ballon représentatif. L’essai a été réalisé le 22 mai 2006, lors d'une journée venteuse, le long de Broadway, de la 42e rue à la 37e rue; ce trajet comprenait un pâté de maisons à chaque extrémité aux fins de la mise en scène.
Afin de surveiller les conditions locales des vents, nous avons installé des capteurs de vent sur les lampadaires aux quatre intersections, de la 41e à la 38e rue, de manière à mesurer les vitesses des rafales latérales. Nous avons également installé des tensiomètres — de simples balances à ressort mécaniques — sur les cordes des manipulateurs du ballon Pikachu que nous avons utilisés pour l’essai sur le terrain afin de comprendre les forces maximales imposées sur les manipulateurs.
Comme prévu, les conditions de vent ambiantes générales sont demeurées relativement stables lors des cinq séries de tests. Bien que nous ayons aussi recueilli des informations sur les directions de vent moyennes, nous avons constaté que le vent était très turbulent et susceptible de provenir de n’importe quelle direction, et ce d’une manière tout à fait imprévisible, même en se basant sur les prévisions météorologiques ou les mesures simultanées prises aux anémomètres situés ailleurs dans la ville, dans un cadre plus ouvert.
Dans l’ensemble, cet essai sur le terrain a confirmé la complexité de la configuration de l’écoulement des vents à Manhattan et le bien-fondé de se fier aux données de l'anémomètre local le jour du défilé si l'on veut bien comprendre les vitesses locales des rafales le long du parcours du défilé.
Nous avons constaté que les rafales pouvaient soudainement surgir ou changer de direction. C’est pourquoi nous avons recommandé l’abandon de la pratique qui consistait à s’appuyer sur les lectures de rafales maximales prises juste avant qu'un ballon atteigne une intersection afin de déterminer comment se déplacer à l’intersection. Au lieu de cette pratique, nous avons recommandé que les capitaines de ballon se réfèrent à la vitesse de « rafale maximale prévue » déterminée statistiquement lors du choix de la hauteur de vol pour traverser une intersection.
Nous avons comparé l'ensemble des données recueillies à partir des capteurs de vent installés aux intersections aux vitesses de vent relevées aux aéroports LaGuardia et JFK ainsi qu’à Central Park. Cette comparaison nous a confirmé la pertinence du multiplicateur suggéré dans le rapport précédent afin de prédire les vitesses des rafales maximales probables selon la vitesse de vent moyenne de l’aéroport.
Le résultat
En adoptant nos diverses recommandations, la ville a permis l’amélioration de la sécurité publique pour les millions de personnes qui se pressent le long des rues de New York lors du défilé de l'Action de grâce. Par la même occasion, nos directives relatives au fonctionnement des ballons font en sorte que les capitaines de ballon et les manipulateurs peuvent se fier à autre chose que leur intuition, réduisant alors les risques d’accident et préservant ainsi une belle tradition.