Fournir un portrait détaillé de l'effet d'éblouissement pour un projet d'aménagement commercial en transformation
Commercial Bay est un projet d'aménagement en secteur riverain de 1,5 milliard de dollars qui s’ajoute au quartier central des affaires d’Auckland. Surplombé par la tour PwC, qui sera le plus haut gratte-ciel de la ville, Commercial Bay comprend également quatre autres bâtiments existants et proposés dont les locataires commerciaux emploieront environ 10 000 personnes. Le groupe de bâtiments — reliés au transport en commun et à proximité des commerces et des restaurants — sera une destination vivante pour les affaires, la vente au détail et le divertissement.
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Le défi
Les concepteurs de Commercial Bay ont prévu des façades de verre pour les immeubles. Les bâtiments dotés de surfaces réfléchissantes peuvent avoir une incidence négative sur leur environnement en créant de l’éblouissement (gênant pour les voisins et dangereux pour les conducteurs) ou même en reflétant l’énergie solaire qui crée de dangereuses zones de chaleur. Afin d’éviter de tels problèmes, de nombreuses municipalités sur la planète ont défini des exigences relatives au vitrage de tels bâtiments.
Les codes de la Ville d'Auckland précisent que le vitrage ne doit pas refléter plus de 20 % de la lumière incidente. Il s’agit d’un paramètre simple conçu à des fins valables, mais qui suscite tout de même des problèmes. Premièrement, si le revêtement du bâtiment reflète moins la lumière, cela peut vouloir dire que plus d’énergie solaire est irradiée dans le bâtiment, augmentant les besoins en refroidissement de celui-ci et, par le fait même, sa consommation d’énergie.
Un second problème est que la réflectivité de la surface d’un matériau varie en fonction de l’angle auquel la lumière le frappe. Même le vitrage qui respecte bien la limite de 20 % d’Auckland peut refléter beaucoup plus que 20 % de la lumière incidente si cette lumière atteint le verre à un angle rasant. L’angle auquel le soleil frappe le bâtiment change tout au long de la journée.
RCP, le cabinet d'experts-conseils ayant été engagé pour les façades de Commercial Bay, nous a engagés dans le but d'effectuer une analyse détaillée propre au site en ce qui concerne le rendement probable des différentes options de vitrage envisagées, dont quelques-unes qui dépassaient la limite de réflectivité officielle de 20 %. Cette analyse visait à permettre aux concepteurs de faire un choix éclairé qui pourrait leur permettre d'atteindre leurs objectifs de :
- protéger la sécurité et le confort des voisins (conformément à l’esprit et l’intention de la règle des 20 %);
- favoriser l’efficacité énergétique et le rendement des nouveaux bâtiments; et concrétiser la vision esthétique des architectes de Commercial Bay.
Notre approche
Après avoir travaillé à comprendre le contexte du projet et les éléments pertinents du code du bâtiment, nous avons entrepris notre analyse. Trois systèmes de vitrage ont été sélectionnés, chacun ayant un niveau différent de réflectivité nominale : 20 % (conformément aux règlements d’Auckland), 30 % et 40 %. Nous avons ensuite entrepris d’analyser les réflexions qui émaneraient de l’aménagement proposé si on utilisait chacun de ces matériaux comme revêtement. À l’aide d’Eclipse, un outil logiciel que nous avons développé à RWDI, des simulations ont été réalisées afin de calculer l’intensité et la fréquence des réflexions provenant des bâtiments de Commercial Bay à chaque heure pendant une année entière. Ce processus nous a donné un aperçu de la manière dont chacun de ces trois vitrages reflèterait les rayons du soleil, étant donné que l’angle d’incidence de ces rayons change selon les saisons et le moment de la journée.
Finalement, ce qui importe n’est pas le pourcentage de lumière qui est reflété par les bâtiments de façon abstraite, mais plutôt quelles sont les répercussions de ces réflexions sur les personnes et les lieux. Nous nous sommes donc servis de notre première simulation pour éclairer notre choix de 45 récepteurs ponctuels pour une étude plus approfondie. Ces récepteurs ponctuels représentaient les zones autour du projet d'aménagement où frapperaient les réflexions provenant des bâtiments. Les points ont été choisis de manière à représenter les conducteurs, les piétons et les pilotes à proximité, ainsi que les occupants des tours voisines. Nous avons ensuite réalisé une simulation afin de calculer les réflexions aux 45 sites (en recueillant la fréquence, l'intensité et la durée) à des incréments d’une minute pendant une année entière. La simulation a permis de quantifier avec précision des millions d'événements réfléchissants attendus. Par exemple, l’éblouissement que peut subir un navetteur conduisant à travers les bâtiments à 7 h 45 vers la fin de février ou le reflet qu’un voisin sur un balcon pourrait apercevoir au coucher du soleil à la mi-juillet.
Prises ensemble, ces analyses ont révélé qu'aux heures de pointe il y aurait peu de différences à Commercial Bay en matière de réflectivité entre les vitrages de 20 % et de 40 %. Aucun scénario ne constituait un risque de gain intense de chaleur. La grande majorité des récepteurs ponctuels n'ont montré aucune différence entre les réflexions prédites selon les différents niveaux de réflectivité des vitrages. Dans les rares sites où l’on remarquait une différence importante, cette dernière ne constituait pas un risque pour la sécurité. Comme prévu, les réflexions étaient plus fortes quand le soleil frappait selon un angle rasant. De tels angles sont toutefois déterminés par l’emplacement, l’orientation et la forme des bâtiments, et le vitrage peut difficilement atténuer ces effets.
Nos analyses ont confirmé que même si certaines des options de vitrage qui ont été envisagées d'un point de vue technique par les experts-conseils dépassaient les règles, aucune n'aurait une incidence négative importante sur l'expérience des habitants d'Auckland dans leur centre-ville.
Le résultat
Notre travail a fourni à l'équipe de conception de Commercial Bay une meilleure compréhension de l'incidence des réflexions sur leur projet d'aménagement et leur a permis de bénéficier d’une analyse quantitative détaillée qu'ils pourront mettre à profit lors de leurs discussions concernant la conformité au code. D'une façon plus générale, notre analyse souligne le bien-fondé de réaliser des études propres à chaque bâtiment afin de comprendre les implications du choix du vitrage pour des sites particuliers, comme les routes à proximité et les bâtiments voisins, au lieu de s'en remettre à des règles simples qui peuvent, ou non, donner les résultats escomptés.
La réglementation en matière d’éblouissement est importante, mais elle n'est pas simple. Outre les propriétés du matériau du vitrage en tant que tel (réflectivité, spectre, forme, inclinaison), d'autres facteurs entrent en jeu, notamment la géométrie du bâtiment et l'angle toujours changeant des rayons du soleil. En raison de cette complexité, certaines villes laissent tomber les simples limites de réflectivité du verre en faveur de mesures du rendement propres à chaque site.